samedi 20 juin 2015


                                   Daniel Vandembroucq a animé cette soirée très constructive
En voici une synthèse écrite par Jean-Marie Tournier, le secrétaire de l'association.

QUELLE GESTION POUR L'EAU À ÉTAPLES ?
Conférence-débat animée par Daniel Vandembroucq, ancien adjoint à la ville d'Étaples
Mercredi 10 septembre, salle de l'abbé Delattre (Étaples)

Introduction

La lettre du préfet du Pas-de-Calais (11 mars 2011) rappelle aux maires l'obligation de renégocier les conditions de fourniture en eau de leurs communes. La loi Sapin de 1993 indique en effet  que les conventions de DSP (délégations de service public) doivent être "limitées dans leur durée" et  la loi Barnier de 1995 vient la compléter en limitant la durée maximale des DSP à 20 ans au plus.
La convention pour la fourniture de l’eau entre la Ville d’Etaples et la Société des Eaux du TOUQUET (aujourd'hui VEOLIA) signée en 1970 prend fin, aux termes de la loi Barnier, le 02 février 2015. La municipalité doit donc redéfinir avant cette date son mode de gestion de l'eau et le tarif de celle-ci:
soit poursuivre une gestion déléguée avec un partenaire privé 
soit passer à une gestion publique sous forme de régie 


La procédure DSP

Une délégation de service public (DSP) est un contrat par lequel  une collectivité confie (= délègue) la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à une société publique ou privée.
Elle obéit à une procédure complexe réglementée par la loi Sapin de 1993. Elles est jalonnée d'étapes à observer scrupuleusement sous peine d'erreurs.
Si en effet cette procédure n'est pas strictement respectée, les conséquences peuvent être fâcheuses pour la commune : ce fut le cas pour le camping de la Pinède et la note à payer par les contribuables étaplois a été sévère.

Les principales étapes sont les suivantes :
  1. Le conseil municipal vote le principe de la DSP. A cet effet il doit disposer
d’une présentation des divers modes de gestion possibles,
d’un projet de cahier des charges de l’affermage
des avis de la Commission Consultative des Services Publics Locaux et du Comité Technique Paritaire
La procédure est ainsi lancée et le conseil municipal élit une Commission spécifique pour l'ouverture des plis (CDSP).
  1. L'opération est soumise à publicité (journal légal et publication spécialisée) pour permettre une mise en concurrence des candidats.
  2. La CDSP sélectionne sur la base de leurs garanties professionnelles, financières, etc., les candidats admis à présenter une offre 
  3. Elle fait parvenir aux candidats retenus un cahier des charges
  4. La CDSP ouvre "les plis" (= les propositions des candidats)
  5. Le maire négocie avec les candidats sur la base de leurs propositions
  6. Le conseil municipal délibère sur le choix du délégataire : tarifs, importance des travaux pris en charge, durée de la délégation, etc.
  7. Contrôle de légalité par la préfecture.
  8. Publication du contrat au journal officiel
  9. Signature du contrat.

Des délais de plusieurs jours, plusieurs semaines, voire plusieurs mois sont imposés en cours de procédure, par exemple :
·       délai d'un mois pour la remise des candidatures à compter de la dernière publication effective ;
·       délai de deux mois entre la date de remise des offres et la date de la réunion du conseil municipal sur le choix du délégataire ;
·       délais de plusieurs jours pour le contrôle légalité en fin de procédure ;
·       etc.
Il semble donc maintenant bien tard pour entamer une procédure de DSP si tel est le souhait actuel du Maire et des élus. Il est vrai que la majorité actuelle avait préconisé lors de la campagne des municipales, comme d’autres listes,  le principe de la gestion de l’eau sous forme de Régie.


La Régie

1.       Tour du « propriétaire »

11.   l'adduction de l’eau pour l’ensemble des communes d’Etaples, du Touquet, de Cucq et de Merlimont est assurée par
les 6 forages du site de Rombly
les 2 forages de La Caloterie
les réservoirs de Rombly (1800 m3), du Mont Levin (500 m3) et de Fromessent (25 m3)
les canalisations entre les forages et les réservoirs
Précision : c'est la ville du Touquet qui est propriétaire de l’ensemble des installations d’adduction, sauf les réservoirs du Mont Levin et de Fromessent qui reviennent à Etaples. Autrement dit : l’eau consommée à Etaples est achetée au Touquet.

12.   la distribution
                94 km de canalisations
5 500 branchements (dont 1 500 en plomb)                         
5 500 compteurs                                                                
                102 poteaux d’incendie                                                    
Au terme de la DSP actuelle, tous ces éléments sont propriétés de la ville d’Etaples, sauf les  compteurs, qui  restent la   propriété de VEOLIA

13.   les fuites
En 1992, la Société des Eaux du Touquet (SET) avait présenté un programme d'amélioration de la ressource en eau (nouveaux forages, détection des fuites, etc.) d'un montant de 10 millions de Francs. Pour le financer, la SET proposait soit une augmentation du tarifs de l’eau soit un allongement de durée de la DSP. C'est cette 2e solution qui a été retenue aussi bien par Étaples que par le Touquet. Pourtant 20 ans plus tard en 2012, la situation s'est nettement dégradée : les fuites sont passées de 23% à près de 30%! (selon le rapport même de Véolia).
En 2012 la législation se durcit: il s'agit de limiter les pertes à 15% , faute de quoi les communes seront exposées à des sanctions. La limitation des fuites est donc une donnée importante à prendre en compte dans le choix du futur gestionnaire.

14.   Les branchements en plomb
Largement utilisé pour les canalisations de petit diamètre jusque dans les années 1960, le plomb a fini par être interdit en 1995. Il peut en effet causer à forte dose un danger pour l'organisme. En 2007, par convention avec la mairie, Véolia devait supprimer progressivement les branchements au plomb. En 2008, près de 200 sont effectivement supprimés, mais seulement 120 entre 2009 et 2012.

15.   La qualité des eaux
L'atrazine est un herbicide très dangereux dont l'utilisation est interdite en France depuis 2003.
Mais elle peut contaminer durablement l’eau et l’environnement ; c'est le cas encore aujourd'hui   des forages de Rombly et de la Caloterie, mais les taux mesurés restent toutefois très largement inférieurs à la valeur sanitaire maximale fixée très persistante dans l’eau et dans l’environnement. Rappelons que la France vient d’être condamnée à nouveau par l’Europe en raison d'une utilisation abusive des pesticides (nitrates en particulier).

2.       Contraintes de la gestion d’un service public de l’eau

21.   obligations
 un fonctionnement permanent : 24 h / 24, 365 j par an
un fonctionnement en continu
une réactivité rapide
des personnels compétents
du matériel d’intervention

22.   références légales
le Code Général des Collectivités Territoriales
le Code de l’Environnement
le Code de la Santé Publique

3.       La Régie
Une régie est le terme juridique pour désigner la gestion directe d'un service public industriel et commercial relevant de sa compétence par une collectivité (mairie, etc.). Par là elle s'oppose à la gestion par délégation.

31.   1re hypothèse : une régie communale
 Il suffit de quelques délibérations pour la créer mais elle nécessite de négocier l’achat de l’eau au Touquet, de recruter un personnel qualifié, de disposer de locaux administratifs, d'assurer un fonctionnement du réseau 24h/24 et 365 jours par an; de disposer des compteurs (propriété de Véolia), de construire un budget, etc.  

32.   2e hypothèse : une régie intercommunale
Elle associerait Étaples, Le Touquet, ainsi que Cucq et Merlimont, puisque ces localités sont alimentées par les mêmes sources de Rombly et de La Caloterie. Ces 4 communes sont déjà associées pour la gestion de l’assainissement, ce qui peut faciliter la mise en place d'une telle régie, mais elle suppose une volonté commune des municipalités d’Etaples et du Touquet (dont les DSP arrivent à échéance à la même date)
Variante : la régie intercommunale pourrait ultérieurement s'élargir au territoire constitué par les 4 communautés de communes que sont CC Mer et Terres d’Opale, CC Opale Sud, CC Montreuil, CC Canton d’Hucqueliers. Cela signifierait une fourniture d'eau beaucoup plus importante et donc une base beaucoup plus large pour les frais fixes de Régie, le personnel à gérer et les investissements à réaliser. Au sein de ce territoire, de nombreuses communes, dont Berck et Montreuil, ont déjà un fonctionnement en Régie. Les problèmes de fuites de réseau, de pollutions, de branchements en plomb, etc. pourraient donc être résolus dans un esprit de solidarité.
Confronté à un problème de vétusté des canalisations et à un défaut de pression par endroits, le syndicat de la Bimoise (7 petites communes) a dû augmenter ses tarifs de près de 70%.

33.   3e hypothèse : adhésion au SIDEN SIAN
Le SIDEN (Syndicat Intercommunal des Eaux du Nord) et le SIAN (Syndicat Intercommunal de l’Assainissement du Nord) ont fusionné en 2009, pour devenir le SIDEN-SIAN. 700 communes, soit près d' 1 million d’habitants, y ont adhéré (91 du Pas de Calais, 487 du Nord, 120 de l’Aisne et 2 de la Somme). Si Étaples choisit de transférer (gratuitement) vers le SIDEN-SIAN la compétence de l'eau, le SIDEN-SIAN fera analyser par ses spécialiste le bilan de la DSP avec VEOLIA et gérera :
    l’achat de l’eau au Touquet
    le problème des compteurs propriétés de VEOLIA
    le remplacement des réseaux vétustes
    les problèmes de fuites des réseaux, de branchements en plomb
    etc.



Conclusion
·         une régie communale : avec les seuls moyens d'Étaples, l'opération laisse sceptique.
·         une régie intercommunale : une hypothèse très intéressante mais soumise à une volonté partagée par Étaples et Le Touquet
·         l'adhésion au SIDEN SIAN : hypothèse plus qu'intéressante. Quelques rencontres et quelques délibérations peuvent suffire à sa réalisation ; le SIDEN-SIAN dispose d'une forte expérience ; et son coût est le moins élevé !


Le débat qui a suivi a porté largement sur les fuites d'eau, l'entretien du réseau, etc. Le représentant de Véolia a abondamment justifié son entreprise en soulignant notamment que le contrat passé avec la commune d'Étaples était parfaitement respecté, et que ses remarques adressées au maire sur les fuites d'eau n'avaient été suivies d'aucun effet.

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